ALLOCUTION DE SEM MARC RAVALOMANANA PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE LORS DE LA CEREMONIE DE PRESENTATION DE VŒUX

PALAIS D'ETAT D'IAVOLOHA VENDREDI 06 JANVIER 2006.

Präsident Marc Ravalomanana 2006

Excellences,
Mesdames et Messieurs,

Monsieur le Doyen, vous avez exprimé avec chaleur, au nom du corps diplomatique, des vœux qui me vont droit au cœur et qui, j'en suis sûr, toucheront profondément mes compatriotes. Soyez en vivement remercié.

A mon tour, je souhaite une nouvelle année pleine de joie et de bonheur à vous tous ici présents et à vos familles respectives. Transmettez également mes meilleurs vœux aux Chefs d'Etat et de Gouvernement,  à vos compatriotes et  aux personnels des organismes que vous représentez aujourd'hui.

A la fin de l'année, on tourne la page. On fait le bilan de ce qu'on a accompli, et on fait des projets pour l'avenir.

En Octobre de l'année dernière, j'ai visité la région de Sofia. J'ai parlé avec la mère d'une famille de cinq enfants. Une famille très pauvre. Cette femme m'a montré avec fierté deux de ses enfants qui avaient commencé à apprendre à lire et à écrire en Septembre. Ils ne mangeaient pas plus de riz qu'avant et ils portaient les mêmes vêtements. Ils habitaient la même vieille maison. Mais, en voyant ses enfants aller à l'école, elle était pleine d'espoir.

A Madagascar, durant l'année 2005, le taux de scolarisation était supérieur à 90% alors qu'en 2003 il était seulement de 67%. C'est une croissance énorme que peu de pays en développement ont pu réaliser dans une période aussi courte. L'année dernière, 1800 salles de classe ont été construites et de nouveaux enseignants recrutés. Et les enfants qui fréquentent ces écoles iront un jour aux écoles secondaires, aux lycées, aux écoles agricoles, aux universités peut être.
Et ils feront mieux que leurs parents. Ils seront plus efficaces dans leur travail. Ils récolteront plus et vivront mieux.

Durant l'année 2005, 805 km de routes nationales et 977 km de routes rurales ont été construites ou réhabilitées. Plus de 7200 km de routes ont été entretenues.

Maintenant, il faut seulement une heure pour aller de Sambava à Antalaha, au lieu de quatre heures auparavant. La portion de route Tuléar - Ihorombe devient facilement praticable. A Antsiranana, les habitants du petit village de Manambero peuvent maintenant  accéder au marché pour vendre leurs produits grâce  à la construction d'une piste rurale de 76 km. Entre Soanierana Ivongo et Mananara, 53 ponts sont actuellement en cours de construction. Dans la Région de Haute Matsiatra, toutes les communes rurales sont devenues accessibles par voiture toute l'année.

61 centres de santé ont été construits et 195 autres réhabilités et équipés.

En ma qualité de Chef d'Etat et en tant que premier responsable du Programme National de Lutte contre le SIDA à Madagascar, je lance un appel solennel à l'ensemble du secteur public, au secteur privé, aux autorités civiles et religieuses et à tous les citoyens pour continuer et intensifier la lutte contre la propagation du VIH / SIDA. Formons des partenariats et mobilisons toutes les ressources pour entreprendre des actions concrètes à grande échelle afin d'enrayer ce fléau, car c'est l'avenir même de notre pays qui est en jeu.

Plus de 80% des tâches que j'ai confiées au Gouvernement en 2005 ont été réalisées. Pour la troisième année consécutive, la croissance économique a dépassé 5%.

Est-ce que tout cela a déjà changé la vie des malgaches ? Pas toujours et pas partout. L'impact d'une nouvelle école, d'une nouvelle route, d'un nouveau puits, d'un nouveau centre de santé ne se voit pas tout de suite. Cela ne change pas tout de suite la vie quotidienne. Mais nous savons tous que tout cela aura un impact énorme pour le développement. Les semences se lèveront.

Cependant j'ai constaté que les paysans du Lac Alaotra ont commencé à renouveler leurs toits. La production de riz a augmenté de 14% en 2005. Le prix du riz, dans un marché libéralisé, s'est stabilisé. Il n'a pas augmenté, comme d'habitude, avant et durant la période de soudure.

Partout les paysans ont augmenté les surfaces cultivées ; ils ont amélioré les techniques d'irrigation ; ils ont utilisé des semences améliorées et plus d'engrais. Au cours de l'année 2006, la récolte augmentera encore et à ce rythme, nous redeviendrons bientôt un pays exportateur de riz et d'autres produits agricoles.

Nous redoublons d'efforts pour promouvoir les exportations. Nous favorisons le Partenariat Public Privé pour encourager et mettre en confiance les acteurs dans ce secteur.

Au cours de l'année 2005, 50.000 touristes de plus qu'en 2004, ont rapporté plus d'argent à nos hôtels, restaurants et boutiques. Par ailleurs, à Fort-Dauphin, plus de 1000 emplois seront créés chez QMM dont la décision d'investissement a été déclarée en 2005.

L'année 2005 était une bonne année, si vous la comparez à l'année 2004. Elle a été caractérisée par une plus grande stabilité politique, sociale et économique. La confiance et la bonne volonté règnent. Et on sent qu'il y a plus d'unité. Madagascar a considérablement amélioré son image à l'extérieur.

Cette année 2006 est décisive pour continuer cet élan après des performances encourageantes.

Madagascar est en passe de devenir un pays pilote en Afrique. La communauté internationale et les bailleurs de fonds ont reconnu nos efforts en matière de développement. Récemment, le FMI a effacé nos dettes. Nous remercions tous les pays et tous les bailleurs multilatéraux qui nous ont fait confiance et nous ont accordé cet effacement de dette.

Est-ce que je suis satisfait des résultats atteints ? Non ! Parce qu'ils sont remarquables mais pas suffisants.

L'inflation, de l'ordre de 11,4 % l'année dernière, est surtout due à l'augmentation excessive du prix du pétrole sur le marché mondial. Les périodes de délestages sont presque terminées, mais les problèmes fondamentaux de la JIRAMA - insuffisance de l'énergie hydro-éléctrique et le prix d'électricité trop élevé restent à résoudre. J'espère que la réunion des bailleurs qui se tiendra à Paris sera un grand pas en avant.

Le manque de capacités se fait sentir dans les ministères et les autres institutions publiques. Les programmes scolaires ne sont pas encore adaptés aux réalités et aux besoins du pays. Il nous manque une bonne formation professionnelle.   L'approvisionnement en eau potable et les travaux d'assainissement avancent, mais pas assez vite.

Dans la Politique Générale de l'Etat 2006, nous allons définir les tâches et les indicateurs pour le Gouvernement. Ces tâches sont ambitieuses mais faisables et je vous demande à tous, représentants des secteurs publics et privés, et bailleurs de fonds de contribuer davantage à leurs réalisations. A cet égard, il faut renforcer la collaboration, mieux communiquer, et redoubler d'efforts.

De temps en temps, on dit qu'il y a une politique à deux vitesses dans ce pays. Mesdames et Messieurs, je ne suis pas prêt de réduire la mienne. Je vous demande alors de faire plus d'efforts pour atteindre plus vite les résultats nécessaires. Oui, nécessaires ! Nécessaires pour le développement de Madagascar.

Nous voulons réaliser notre Vision " Madagascar - naturellement ! Nous voulons atteindre les Objectifs du Millénaire. Nous voulons réduire la pauvreté. Nous voulons réduire la mortalité infantile et améliorer la santé. Nous voulons renforcer le monde rural.  Nous voulons atteindre une croissance économique à deux chiffres. Nous voulons des villes et des villages florissants.

Si nous voulons tout cela, nous devons assurer la bonne gouvernance. Nous devons également renforcer l'éducation et la santé.  Nous devons améliorer le climat des investissements. Nous devons assurer la sécurité. Nous devons  éliminer la corruption et renforcer l'efficacité de l'administration publique. Nous devons préserver et valoriser nos richesses naturelles.

Toutes les activités des bailleurs de fonds devront contribuer à la réalisation de ces objectifs à travers les programmes nationaux.


Nous devons avoir une meilleure planification, incluant un bon aménagement du territoire. Nous devons avoir un cadre clair des investissements et les ressources financières nécessaires pour atteindre nos objectifs.

Nous devons mieux coordonner les activités des bailleurs de fonds. Nous devons être plus efficaces dans la mise en œuvre de nos programmes. Renforçons nos capacités et soyons plus honnêtes.

Rappelons-nous que nous travaillons pour le peuple et assurons le financement des projets pour que les fonds parviennent au monde rural et aux villes, là où la population attend notre assistance.

En particulier, le système de micro-crédit sera renforcé. Le financement du monde rural demeure capital. Madagascar a adhéré à la déclaration des Nations Unies de faire de l'année 2005 l'année de la micro-finance et continuera d'en faire un levier pour son développement.

Mesdames et Messieurs,

Pour accélérer le processus de développement, nous lancerons le Plan d'Action pour Madagascar qui va intégrer tous ces objectifs et toutes ces mesures.
Il nous fournira un nouveau cadre pour la restructuration de notre politique de développement. Ce nouveau plan nous permettra de travailler plus vite et d'être plus efficaces.

Le Plan d'Action pour Madagascar servira aussi de nouvelle base à la coopération avec les bailleurs de fonds. Dans la déclaration du G8, dans la Déclaration de Paris, dans le Plan d'action de la Banque Mondiale, dans la nouvelle stratégie de l'Union Européenne et dans le Millenium Challenge Account, les pays industrialisés ont promis un nouvel engagement en faveur de l'Afrique. Un engagement à long terme, axé sur l'aide budgétaire.

Voilà notre réponse : le Plan d'Action pour Madagascar. Je demande aux pays industrialisés et à tous les bailleurs  de fonds de tenir leur parole et de réaliser ce qui a été promis.
Je ne parle pas seulement pour Madagascar, mais aussi pour le continent africain. L'Afrique n'a pas bénéficié pleinement des opportunités de la mondialisation. Il faut changer cette situation.
 
Il est de mon devoir, Mesdames et Messieurs, de rappeler ce constat aux pays industrialisés. Il m'appartient d'informer les investisseurs internationaux sur les potentialités et les opportunités de Madagascar. Aujourd'hui, la Grande Île a une importance particulièrement accrue et la communauté internationale nous fait davantage confiance.

La contribution de la communauté internationale à notre développement est cruciale. Mais soyons honnêtes avec nous mêmes, car la plus grande partie du processus de développement dépend de nos propres efforts. Mais très souvent, nous le considérons différemment.

Nous attendons toujours les bailleurs de fonds. Par exemple, qui va assurer le financement d'un projet quelconque? Les bailleurs de fonds ! Qui va assurer sa mise en œuvre? Les bailleurs de fonds ! Comment résoudre les problèmes ? Demandons aux bailleurs de fonds !

Où est notre fierté ? Où est notre ambition de réussir ? Est-ce que nous ne sommes pas capables d'entreprendre quelque chose nous-mêmes ? Est-ce que nous voulons toujours attendre l'oncle riche d'Europe ou d'Amérique ou d'Asie ?

Nous devons cultiver un esprit participatif. Chacun de nous doit assumer ses responsabilités : le paysan doit accroître sa récolte, l'entrepreneur doit développer de nouveaux produits et mieux servir ses clients, le fonctionnaire doit travailler plus efficacement. Toutefois, pour les grands projets nous sollicitons le concours de nos partenaires internationaux.

 

Solennellement, je demande au gouvernement, à tous les agents de l'Etat, des Régions et des Communes de prendre conscience que les services que vous rendez aux citoyens ne sont pas des faveurs ; ce sont leurs droits. Nous avons le devoir de servir les citoyens et de leur donner satisfaction, d'une manière rapide, serviable et accessible.

En contrepartie, les citoyens doivent prendre leurs responsabilités, en payant les taxes, en respectant l'Etat de Droit, en refusant la corruption, voire en la dénonçant. La corruption sera punie et personne n'est au-dessus de la loi.

Nous, Malgaches, nous avons d'importantes valeurs culturelles et des atouts exceptionnels. Dans le passé, trop souvent ils ont été négligés, car nous sommes toujours accaparés par les problèmes de la vie quotidienne.

Si nous voulons une forte croissance économique, nous devons  changer. Si nous ne changeons pas notre état d'esprit et notre comportement, nous resterons pauvres. Ce pays ne changera pas, si nous, nous ne changeons pas.

Tous les Malgaches aspirent à une vie meilleure. Nous voulons des écoles, des hôpitaux, des routes, des maisons. Nous voulons tous que Madagascar se développe. Mais nous sommes passifs. Nous attendons que d'autres fassent l'effort à notre place pour que nos aspirations se réalisent.

L'avenir est entre nos mains. Nous devons transformer notre société pour réaliser un développement rapide. Nous devons faire preuve de dynamisme : " travaillons, travaillons bien, travaillons dur ". Et nous allons augmenter le salaire des fonctionnaires de 12% à partir de ce mois de Janvier 2006. Je compte aussi sur le secteur privé sur cette question. Nous devons relever le défi de réussir, d'obtenir des résultats.

Mesdames et Messieurs,

Dans tout ce processus, nous voulons rester malgaches, garder notre culture, notre joie de vivre. Il est possible de développer notre pays tout en gardant notre identité culturelle. Tout dépend de notre volonté. La meilleure stratégie est de garder l'héritage de nos ancêtres, entre autres le " Fihavanana ", nos valeurs culturelles et notre histoire qui fait notre fierté.

Chacun de nous a ses propres idées sur le développement. C'est bien de discuter avec ferveur des différentes manières de procéder au développement. C'est bien d'avoir des idées différentes sur le plan politique, économique, social et culturel. La démocratie est comme un marché, pas un marché de marchandises, mais un marché où l'on discute les idées, pour que les meilleures idées gagnent.

Cela peut bien marcher à condition qu'on ait le même objectif, que tout le monde soit honnête et ait la bonne volonté de construire et non de détruire, que tout le monde ait une attitude positive et qu'il y ait un respect mutuel.

A cet égard, j'exhorte tous les Malgaches à préserver l'unité nationale. Tournons la page et oeuvrons ensemble pour un avenir florissant.

L'année 2006 sera une année de changements. L'année 2006 sera une année caractérisée par de nouvelles perspectives. L'année 2006 sera également une année des opportunités. Faisons preuve de créativité pour en tirer avantage. Valorisons nos atouts, en particulier le potentiel de nos ressources naturelles et de nos ressources humaines.

Soyons unis dans ces objectifs. Travaillons ensemble pour construire " le mur du développement " de Madagascar et nous pourrons tous en bénéficier.
 
Je vous remercie.

Quelle: tim-madagascar