Zone franche : Sort peu enviable pour les travailleurs malgaches à Maurice

Midi Madagasikara 22.01.2003

Combien sont-ils, les travailleurs malgaches dans les entreprises franches mauriciennes. Même l’Ambassade malgache à Maurice ne connaît pas leur nombre exact puisque il y a des réguliers et des irréguliers. De toute façon, qu’ils soient réguliers ou pas, l’ancienne équipe de l’Ambassade ne se souciait guère de leur sort. Et pourtant, leur sort est loin d’être enviable, à entendre ce témoignage de R.J qui a déjà fait quatre ans de travail dans une entreprise franche mauricienne.

EDomond Rakotomalala

Comme la plupart d’entre elles sont également présentes à Madagascar, les entreprises franches mauriciennes connaissent bien la pratique salariale dans la zone franche malgache. Et elles appliquent un taux juste un peu plus élevé que celui des salaires à Madagascar. « Le salaire d’embauche est d’environ 2100 roupies (environ 525.000 Fmg) pour les ouvriers malgaches, alors que le Mauricien touche en première année d’embauche 300 roupies (environ 750.000 Fmg). Et la différence de traitement ne s’arrête pas au niveau du salaire de base puisque si les ouvriers mauriciens bénéficient d’un certain nombre d’avantages extra-salariaux comme le gaz, la nourriture et le logement, les ouvriers malgaches sont entassés comme des esclaves dans des taudis.

Amertume

« L’entreprise nous loge dans une petite salle de 9 m² pour 4 personnes et la chambre fait en même temps office de cuisine », raconte R.J. qui constate avec amertume que les Malgaches ne sont même pas traités comme les autres travailleurs étrangers. « Les ouvriers chinois sont mieux traités que nous puisque c’est le gouvernement chinois lui-même qui est intervenu auprès des patrons des entreprises mauriciennes pour que ces derniers appliquent de bonnes conditions de travail pour les travailleurs chinois ». En effet, « le gouvernement chinois a carrément déclaré que si de bonnes conditions de travail ne sont pas appliquées, il retirerait la main d’œuvre chinoise du marché mauricien » Une exigence qui a, en tout cas, obtenu satisfaction dans la mesure où les chefs d’entreprises à Maurice tiennent à ces ouvriers chinois. Tout comme ils tiennent beaucoup aux employés malgaches réputés pour leur ardeur au travail et leurs compétences.

Compliquée

Par ailleurs, les ouvriers malgaches à Maurice ont une vie familiale très compliquée. Même si le travailleur est un père de famille, les patrons refusent l’embauche de sa femme. Ce qui fait qu’un couple malgache dont le mari est travailleur à Maurice ne se rencontre qu’à peine une fois tous les ans. « Si on veut faire venir notre famille, ce sera à nos propres frais et leur séjour en terre mauricienne ne doit pas dépasser un mois ». Si ce n’est pas de l’esclavage, cette ingérence dans la vie intime de l’ouvrier y ressemble beaucoup. Si c’est le père de famille travailleur qui veut se rendre à Madagascar pour des vacances, il n’a plus le droit de le faire que tous les trois ans. « Avant, on pouvait rentrer au pays tous les ans, maintenant tout a changé et on doit attendre trois bonnes années pour fouler de nouveau le sol de notre chère patrie et de retrouver notre famille », témoigne R.J qui laisse au pays sa femme et ses deux enfants âgés respectivement de 5 ans et d’un an. « Mon premier souhait est d’avoir ma petite famille que j’aime beaucoup auprès de moi, mais pour le moment, c’est encore du domaine de l’impossible car je n’ai pas le choix. Si je veux ma famille, je perds mon emploi »

Droit

Bref, comme ils sont libres de rester au pays ou de continuer à vivre à Maurice, ces travailleurs malgaches ont le droit de faire ce qu’ils veulent. Seulement, le gouvernement, à travers l’Ambassade, doit travailler pour parvenir à améliorer leurs conditions de travail. Est-ce trop demander, Monsieur l’Ambassadeur ?

En tout cas, les travailleurs malgaches à Maurice commencent actuellement à avoir de l’espoir puisque l’actuel Ambassadeur malgache à Maurice SEM Bruno Ranarivelo a déjà pris l’initiative de visiter une entreprise franche et de s’enquérir de la situation de ses compatriotes. Par ailleurs le ministre des Affaires Etrangères le Général Marcel Ranjeva a profité de son séjour à Maurice pour voir de près ces cas sociaux malgaches depuis longtemps en attente de conditions de vie dignes d’un être humain.